Les premières images du télescope spatial Euclid avec la caméra VIS
Un mois et demi après son lancement, la phase de vérification des performances du télescope spatial Euclid est entamée le 12 août 2023, après le dévoilement le 31 juillet 2023 des premières images des instruments VIS et NISP. Par leur excellente qualité, ces images attestent du bon fonctionnement de l’ensemble du satellite, et sont prometteuses de l’accomplissement des objectifs scientifiques de la mission.
Après son lancement depuis la Space Force Station à Cap Canaveral en Floride le 1er juillet 2023, le satellite Euclid a parcouru 1,5 million de kilomètres (soit près de quatre fois la distance Terre-Lune) dans la direction opposée au Soleil, afin d’atteindre son orbite d’observation au point de Lagrange L2 du système Soleil-Terre. Le rayon de cette orbite varie entre 400 000 et 800 000 kilomètres, et le satellite cohabite dans cette région du système solaire avec les télescopes JWST et Gaia, placés sur des orbites distinctes. Le point de Lagrange L2 permet à un télescope de regarder dans la direction opposée au Soleil afin d’étudier le ciel astronomique sans que ni le Soleil, ni la Terre, ni la Lune ne gênent ces observations, tout en pointant une antenne vers la Terre afin de rester en communication étroite avec celle-ci pour le pilotage des observations et le transfert des données.
Les premiers tests du satellite furent effectués un mois après son lancement, visant notamment à réaliser la mise au point du télescope, et procéder à l’étalonnage du capteur de guidage fin (« fine guidance sensor », ou FGS), qui utilise des étoiles pour pointer le télescope de façon extrêmement stable vers ses cibles dans l’espace. Le télescope a alors pu prendre ses premières images du ciel en pointant vers une région située entre les constellations de la Carêne et d’Eridan.
Les images du télescope Euclid sont obtenues avec l’imageur visible VIS (VISible instrument) et le spectromètre infrarouge NISP (Near Infrared Spectro Photometer). Ces deux instruments furent développés par le consortium Euclid, dont la France est le premier pays contributeur, impliquant principalement le CNRS, le CEA et des universités partenaires, et dont le responsable du projet est Yannick Mellier, directeur de recherche à l’Institut d’astrophysique de Paris (IAP), un laboratoire du CNRS et de Sorbonne Université. Le consortium Euclid bénéficie par ailleurs du soutien du CNES sur toutes ses activités de management, de développement et de réalisation des instruments, ainsi que du traitement des données de la mission.
L’instrument VIS fonctionne dans le domaine de longueurs d’ondes visibles (entre 550 et 900 nanomètres). Chaque images VIS contient 609 millions de pixels de 0,1 seconde d’arc, couvrant une surface totale de 0,57 degré carré (presque trois fois le diamètre angulaire de la Lune). La Figure 1 montre une telle image complète (à gauche), dont un détecteur qui contient dans son champ un amas d’étoiles situés dans notre galaxie la Voie Lactée, ainsi que deux galaxies spirales lointaines (vers le centre et à droite). Les images sont d’une netteté remarquable. On voit aussi dans les quatre quadrants de ce même détecteur des étoiles très lumineuses de la Voie Lactée. Leur centre est souvent saturé, et elles présentent également des aigrettes provenant des supports du miroir secondaire qui réfléchit la lumière reçue par le miroir primaire de 1,2 mètre de diamètre d’Euclid, vers les instruments.
Figure 1 : Images obtenue par une pose unique de 566 seconde de l’instrument VIS du télescope Euclid. Celle sur la gauche est l’image entière des 36 détecteurs du plan focal de l’instrument. L’image de droite encadrée en blanc correspond à un seul détecteur, situé en haut à gauche de l’image entière. On peut voir dans ce champ individuel deux galaxies spirales, dont une vue de face dans le quadrant inférieur droit, et une autre inclinée et donc vue sur la tranche dans le quadrant supérieur gauche. On y voit également dans le quadrant supérieur droit un amas d’étoiles situé dans notre galaxie la Voie Lactée. Ces images de VIS n’ont subi aucun traitement et comportent des effets qui devront être nettoyés par la chaîne de traitement développée par le segment sol. Crédits : ESA, Euclid, Consortium Euclid, NASA
Contact
Yannick Mellier
Institut d’astrophysique de Paris, CNRS, Sorbonne Université
Audrey Le Reun
Institut d’astrophysique de Paris, CNRS, Sorbonne Université