Une percée sur la formation des atmosphères des exo-Terres
Les exoplanètes pourraient capturer dans leurs atmosphères un gaz tardif pendant plusieurs dizaines de millions d'années, ce qui les enrichirait en carbone et les rendrait potentiellement propices à la vie. C’est la conclusion à laquelle parvient une équipe menée par un astronome de l’Observatoire de Paris – PSL au Laboratoire d’Études Spatiales et d’Instrumentation en Astrophysique (Observatoire de Paris - PSL/CNRS/Sorbonne Université/Université de Paris) dans une étude qui parait dans la revue Nature Astronomy en date du 6 avril 2020.
On dénombre à ce jour plus de 4 000 exoplanètes1 qui surprennent par leurs diversités et celles de leurs systèmes. Leurs observations détaillées permettent de révéler que leurs atmosphères sont très variées. Il est communément admis que l’origine de cette diversité est liée aux processus de formation et à l’histoire des systèmes planétaires.
Les atmosphères des exoplanètes sont un mélange de différents gaz : ceux présents dès leur formation, ceux éjectés depuis leur intérieur sous forme de volcanisme, ou enfin ceux ″déposés″ par collisions avec des comètes. Des travaux dirigés par un astronome de l’Observatoire de Paris - PSL au Laboratoire d’Études Spatiales et d’Instrumentation en Astrophysique (LESIA : Observatoire de Paris - PSL/CNRS/Sorbonne Université/Université de Paris) montrent qu’un quatrième processus pourrait bien dominer tous les autres : l’accrétion tardive de gaz.
En utilisant les antennes du réseau ALMA qui observent les rayonnements submillimétriques, les astronomes ont en effet découvert des disques de gaz tardif autour d’un très grand nombre d’étoiles, un gaz apparu bien après que leurs planètes se soient formées dans leur cocon initial. De ce gaz, les atmosphères des planètes seront amenées à s’enrichir pendant plusieurs dizaines de millions d’années.
Ce gaz est probablement relâché par des collisions entre des planétésimaux - corps rocheux de plusieurs dizaines de kilomètres -, qui orbitent à la périphérie des systèmes planétaires. Le gaz produit est principalement composé de monoxyde de carbone (CO), et probablement d’eau et de molécules plus complexes. L’analyse de la distribution du gaz montre qu’il est entrainé vers l’intérieur du système et l’étude révèle qu’il peut être ainsi capturé par les planètes.
Ce processus très efficace permet d’accumuler jusqu’à plusieurs millions de fois la masse de l’atmosphère terrestre et apparaît donc suffisant pour former des atmosphères aussi massives que celles de la Terre ou de Vénus, mais aussi des atmosphères bien plus épaisses comme celles des mini-Neptunes (appellation donnée aux exoplanètes de taille intermédiaire entre la Terre et Neptune et entourées d'une atmosphère épaisse). Les molécules générées dans les régions externes des systèmes planétaires et qui sont entrainées vers l’intérieur et capturées par les planètes pourraient être potentiellement favorables au développement des premières briques de la vie.
Ces hypothèses pourront être testées avec le futur télescope spatial, le James Webb Space Telescope, et au sol, avec l’Extremely Large Telescope européen.
(1) Au 31 mars 2020, l'Encyclopédie en ligne des planètes extrasolaires (exoplanet.eu) fondée par l'Observatoire de Paris, dénombre 4 241 exoplanètes détectées.
- Légende : Accrétion de gaz tardif sur une planète similaire à la Terre. Le gaz est relâché dans un disque de planétésimaux plus lointain que la planète et migre vers l’intérieur jusqu’à se faire capturer par la planète, ce qui crée une nouvelle atmosphère sur cette dernière, qui peut avoir une masse similaire à l’atmosphère terrestre ou même devenir bien plus massive que l’atmosphère vénusienne.
- Crédit : Sylvain Cnudde / Observatoire de Paris - PSL
- Référence : ce travail de recherche a fait l'objet d'un article intitulé « Formation of secondary atmospheres on terrestrial planets by late disk accretion », par Q. Kral et.al., à paraître le 6 avril 2020 dans la revue Nature Astronomy.
DOI : 10.1038/s41550-020-1050-2
Contact chercheur
Quentin Kral
Astronome
Observatoire de Paris – PSL
LESIA