Vers une nouvelle génération d’imagerie acoustique

Si l’imagerie ultrasonore laser est dorénavant reconnue comme un outil puissant d’investigation des propriétés élastiques dans des domaines variés allant des aspects applicatifs à la recherche fondamentale, certains verrous subsistent. La génération par des lasers femtoseconde de fronts acoustiques avec des longueurs d’ondes de quelques dizaines de nanomètres assure une excellente résolution en profondeur mais ne permet pas, à ce jour, d’atteindre de telle résolution dans le plan des couches. Afin de solutionner ce point, des chercheurs de l’équipe Acoustique pour les nanosciences de l’INSP ont proposé de coupler des approches pompe sonde optique avec des concepts de microscopie de proximité ouvrant ainsi la voie à de l’imagerie acoustique 3D à l’échelle de quelques nanomètres.

L'imagerie acoustique nécessite avant tout comme élément de base une source acoustique. Afin d’obtenir une imagerie 3D, cette dernière doit satisfaire certains critères :

  • La génération d’ondes acoustiques de très haute fréquence. Ceci est depuis plusieurs décennies maîtrisé par l’absorption d’impulsions laser femtoseconde qui engendrent par effet thermoélastique des champs de contraintes ultrabrefs de quelques picosecondes. Le corollaire étant la création de fronts acoustiques cohérents avec des longueurs d’onde de quelques nanomètres.

La taille latérale de la source doit de surcroît être de dimension nanométrique. À l’heure actuelle c’est bien là le point faible. En effet, la focalisation des faisceaux d’excitation laser est assurée en champ lointain par des dispositifs de style objectif de microscope. Par conséquent, il est difficile de descendre bien en dessous des longueurs d’onde optique des sources laser à savoir 800-400nm.

La source doit être mobile à la surface du système à caractériser. Ce dernier élément disqualifie les sources acoustiques obtenues par le biais de la désexcitation vibrationnelle d’objets individuels, qui étaient envisagées il y a quelques années et dont le contrôle positionnel en surface s’avère plus que problématique.

La géométrie expérimentale proposée (fig. 1a) présente l’avantage de solutionner simultanément les points évoqués précédemment. La focalisation du faisceau pompe sur la face du cantilever permet la génération d’un paquet acoustique haute fréquence (50Ghz), qui, en se propageant dans l’axe de la pointe va permettre l’obtention d’une source acoustique confinée à son extrémité. Cette source est alors facilement déplaçable à la surface du système d’étude.

a) Schéma de principe de l’excitation. Une simulation par éléments finis permet de rendre compte du guidage d’une onde longitudinale L et transverse T.   b) Cartographie d’impédance sur un plot d’or déposé sur silicium. La résolution latérale estimée ici est de l’ordre de 250nm soit un facteur 10 plus faible que la résolution accessible par une imagerie acoustique conventionnelle.
a) Schéma de principe de l’excitation. Une simulation par éléments finis permet de rendre compte du guidage d’une onde longitudinale L et transverse T. b) Cartographie d’impédance sur un plot d’or déposé sur silicium. La résolution latérale estimée ici est de l’ordre de 250nm soit un facteur 10 plus faible que la résolution accessible par une imagerie acoustique conventionnelle.

Dans cette géométrie, nous avons validé dans un premier temps que l’écho acoustique réfléchi par le sommet de la pointe permettait de réaliser des cartographies d’impédances acoustiques à des échelles bien inférieures à celles autorisées par des faisceaux pompes sondes focalisés en champ lointain (fig 1b). Par ailleurs, nous avons démontré la transduction d’une onde longitudinale de l’extrémité de la pointe vers l’échantillon ouvrant ainsi la porte à de l’imagerie 3D.

Ces premiers résultats reposent sur la synthèse d’onde longitudinale, la création d’ondes transverses porteuses d’informations complémentaires reste encore à être appréhendée. La limite de résolution doit être quantifiée aussi bien pour l’imagerie de surface que pour celle de volume. Le filtrage des hautes fréquences par la nature du contact pointe/échantillon est également un aspect qu’il faudra prendre en compte. Les formes très variées de pointe accessibles facilement dans le commerce sont aussi autant de pistes d’optimisation qu’il conviendra d’exploiter dans l’avenir.


« Towards acoustic microscopy at the nanoscale by coupling atomic force microscopy with picosecond ultrasonics » R. Delalande, D. Garcia-Sanchez, and L. Belliard, PHYSICAL REVIEW B 107, 085409 (2023)

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Laurent Belliard