Muriel Darces

Muriel Darces

Maîtresse de conférences en électronique

Nous avons la responsabilité d'aider les étudiants à s’orienter et à s’insérer dans le monde du travail.

Electronicienne et responsable d’un parcours en sciences pour l’ingénieur à Sorbonne Université, Muriel Darces partage son quotidien entre recherche, enseignement et insertion professionnelle.

« Vous voulez vraiment m’interviewer ? Mais je suis une prof normale », plaisante l’enseignante-chercheuse. Sous ses lunettes couleur or, Muriel Darces affiche un sourire affable. De ceux qui mettent tout de suite en confiance et engagent à la discussion. Son humilité est à la hauteur de l’énergie débordante qu’elle a mise au service de Sorbonne Université et de sa communauté étudiante.

Alors qu’elle est l’une des premières filles de sa famille à faire des études supérieures, elle choisit les sciences pour l’ingénieur à l’Université Pierre et Marie, et se spécialise en électronique. Elle apprécie l’aspect technique et expérimental que requiert cette discipline et poursuit en DEA1 de génie électrique. « Je m’intéressais aux systèmes de très forte puissance que l’on retrouve dans les réseaux de production, d'acheminement et de distribution de l'électricité. Puis, j’ai fait une thèse sur des matériaux magnétiques utilisés dans ce type de système », précise-t-elle.

Côté recherche

Après un post-doctorat à Cachan, elle décroche, en 1998, un poste de maîtresse de conférences à Lyon avant de revenir à l'université Pierre et Marie Curie trois ans plus tard. « J’ai dû réorienter toutes mes activités de recherche autour de l’électromagnétisme. Un véritable changement de discipline avec une physique bien différente de celle que j'avais l'habitude de manipuler », explique-t-elle. Depuis, la scientifique travaille sur la propagation des ondes électromagnétiques dans les milieux complexes, comme la mer, « un milieu très perturbé et difficile à modéliser ». L’équipe à laquelle elle appartient développe des moyens pour améliorer la surveillance de la zone économique exclusive (ZEE) 2.  Une question stratégique pour l’état français qui possède, avec ses territoires et départements d’Outre-mer, la deuxième plus grande ZEE après les États-Unis. « Les radars micro-ondes aujourd’hui déployés pour la surveiller n’ont une portée que de quelques dizaines de kilomètres. Cela ne suffit pas à couvrir de façon optimale une zone qui représente 11 millions de km2 et s’étend jusqu’à 370 km des côtes. » L’un des objectifs de l’équipe est donc de proposer, en partenariat avec d’autres acteurs industriels et universitaires, des solutions plus efficaces et moins coûteuses pour surveiller un tel environnement. « Nous travaillons sur des radars haute fréquence, indique-t-elle. Nous essayons de développer une géométrie d'antenne qui permette de concentrer le champ électrique à l'interface entre la mer et l'air. De cette façon, les ondes envoyées par l’antenne vont pouvoir suivre la courbure terrestre, dépasser l'horizon et avoir une portée bien plus grande. »

L’autre axe de recherche sur lequel travaille l’enseignante-chercheuse concerne un tout autre domaine, non moins complexe : la sécurité électromagnétique des systèmes d'information. « Dans un boîtier d'ordinateur, il y a des cartes à travers lesquelles transitent des signaux, expose-t-elle. Certains d’entre eux peuvent être porteurs d'informations sensibles. Notre travail est d’évaluer la capacité de l’équipement à ne pas laisser fuir d’information, à faire face à une agression extérieure ou encore à fonctionner correctement dans un environnement bruité. » Pour cela, son laboratoire a fait l’acquisition d’une chambre anéchoïque, installée à Saint-Cyr. « Elle nous permet de réaliser des mesures qui nécessitent d'avoir un environnement contrôlé sans pollution électromagnétique extérieure ». Un équipement d’excellence dont bénéficient également les étudiants du master Sciences pour l’ingénieur (SPI) lors de travaux pratiques ou de stages.

Côté enseignement  

En parallèle de ses activités de recherche, la scientifique se consacre à l’enseignement et à la bonne gestion du parcours « Systèmes communicants » dont elle est responsable depuis 2012. « Un travail d'équipe, insiste-t-elle. Comme pour la recherche, d’ailleurs. Tout le monde est très impliqué, ce qui permet de mener à bien les missions ». Au sein du département de Sciences pour l’ingénieur, Muriel Darces a choisi de s’investir tout particulièrement dans le champ de l’insertion professionnelle, une mission mise en avant par l’université ces dernières années. « Nous avons une grosse responsabilité envers les étudiants pour les aider à s’orienter et à s’insérer dans le monde du travail. Je me suis donc formée et j'ai profité des compétences déjà présentes au sein de l'université, et notamment au Service Orientation et Insertion de la faculté pour mettre des choses en place. » Grâce à un appel à projets pédagogiques, elle organise avec ses collègues, une semaine d’immersion hors les murs dédiée à ces questions. Au programme : gestion de projet, ateliers sur les outils de recrutement et simulation d'entretien d’embauche. « C'est l'exercice préféré de la semaine, souligne-t-elle. Cela permet aux étudiants d’acquérir les bons réflexes et les codes pour la suite. » Un exercice qui porte ses fruits puisque le département de formation peut se targuer d’avoir un taux d’insertion professionnelle supérieur à 95% à seulement six mois de l’obtention du diplôme.

Pour renforcer encore les liens avec le monde professionnel, Muriel Darces a aussi systématisé les visites des tuteurs de stage en entreprise. Une manière, pour la communauté enseignante, de mieux connaître l’environnement de travail de leurs étudiants, de vérifier que les stages se passent bien, mais aussi de montrer l'intérêt de l'université pour l'entreprise et ses activités. « C’est aussi l’occasion de s'imprégner des besoins industriels et de faire éventuellement évoluer la formation, confie l’enseignante. Au fil du temps, cela a permis de fidéliser un certain nombre d'entreprises qui ont trouvé, chez nous, des compétences qui répondaient parfaitement à leurs besoins. »

Le souci de l’autre

Depuis quelques années, Muriel Darces a aussi rejoint le dispositif Cap en fac pour présenter l’offre de formation de l’université aux élèves de Terminale, les aider dans leur choix d’orientation, et promouvoir les sciences auprès des lycéens et des lycéennes. « Quand j’étais en licence, nous n’étions que trois filles sur une promo de 120. Aujourd’hui, elles sont un peu plus nombreuses en sciences de l’ingénieur, mais le déséquilibre de genre est encore bien réel dans ces filières. Et je crois que le fait qu’une femme vienne parler d’électronique, d’informatique, de mécanique… permet de leur montrer qu’elles ont toute leur place dans ces disciplines », affirme l’enseignante-chercheuse.

Et une fois inscrits, Muriel Darces est aux petits soins avec ses étudiants et étudiantes. Pendant les confinements successifs, elle n’a cessé de multiplier les contacts par mails et par visio-conférences pour n’en laisser aucun sur le bord de la route. Parmi eux, il en est un qu’elle a particulièrement encouragé :  l’athlète de haut niveau, Aurel Manga, finaliste du 110 mètres haie aux jeux olympiques de Tokyo. Avec l’équipe pédagogique et le DAPS3, elle a aménagé, pendant tout son cursus, son emploi du temps, décalé certaines évaluations en fonction de ses préparations et de ses compétitions, s’est rendue disponible pour lui faire passer des examens, etc. « C’est quelqu’un d’hyper motivé, de très courageux et je trouve très bien que l'université accompagne ces jeunes sportifs aussi loin que possible dans leur carrière. Je suis admirative de leur parcours parce que ce n’est pas simple de réussir à s'entraîner à ce niveau-là tout en trouvant les ressources pour valider un diplôme exigeant. Je suis d’ailleurs admirative du parcours des étudiants en général car beaucoup d'entre eux sont obligés de travailler en parallèle, et cela sans qu’on n’ait jamais renié notre niveau d'exigence. Ils m’impressionnent vraiment », conclut-elle.  


 1 Diplôme d’études approfondies
 2 ZEE : zone maritime s’étendant jusqu’à 370 km des côtes, sous la responsabilité des états côtiers

3 Département des activités physiques et sportives