Philippe Watteau

Nouveau président de la Société d'accélération du transfert de technologie (Satt) Lutech, Philippe Watteau a forgé, tout au long de son parcours, des liens solides entre l’industrie et la recherche. Il nous partage ses ambitions et sa vision pour dynamiser l’écosystème de l’innovation de Sorbonne Université à travers la Satt Lutech.

Vous avez occupé des postes clés au sein de l’industrie et de la recherche technologique. Comment votre expérience dans ces différents secteurs vous a-t-elle préparé à présider la Satt Lutech ?

Philippe Watteau : J'ai débuté ma carrière dans les affaires européennes à Bruxelles avant de rejoindre l'industrie. J’ai travaillé pendant dix ans chez Renault et chez Air Liquide, en stratégie, en recherche et développement et en déploiement à l’international. J’ai également travaillé durant dix ans dans la recherche, au sein du CEA en tant que directeur des partenariats industriels et directeur d’institut. J’ai ensuite dirigé pendant trois ans l'institut pour la transition énergétique, Vedecom. Cette fondation partenariale universitaire a été une expérience particulièrement enrichissante, réunissant des chercheurs de l'Université de Versailles Saint-Quentin et des ingénieurs de l'industrie autour de projets liés aux véhicules électriques et automatisés.

Durant mon parcours, j’ai eu l’occasion de travailler avec quasiment tous les secteurs industriels français tels que l'automobile, l'aéronautique, la défense, l'agroalimentaire, les services et l'énergie. Je me suis concentré sur trois grands axes. D’abord, le transfert technologique en développant de partenariats forts entre des industriels et des laboratoires de recherche, notamment à partir des usages. Ensuite, le management d'équipes de recherche, en dirigeant près de 1000 chercheurs dans le domaine du numérique, en très grande proximité avec leurs préoccupations quotidiennes et en leur apportant des outils de développement. Enfin, la recherche de financements institutionnels, en montant de nombreux projets nationaux et européens au bénéfice des laboratoires.

Cette double expérience dans l'industrie et la recherche technologique m’a permis de très bien connaître et comprendre le monde socio-économique, de faciliter et stimuler le transfert de technologie entre ces deux sphères dans une dynamique collective d’innovation.

Quelles motivations vous ont poussé à accepter ce rôle de président de la Satt Lutech ?

P. W. : Passionné par l’innovation depuis toujours, mes motivations profondes en acceptant la présidence de la Satt Lutech sont doubles : servir et développer. D'une part, je souhaite m’engager à servir la recherche en ayant une relation étroite avec les chercheurs, en comprenant leur travail et leurs résultats et en valorisant leurs découvertes auprès de la société. D'autre part, ma motivation est de créer de la valeur à partir des résultats de la recherche.

La Satt Lutech représente une opportunité unique de collaborer avec des chercheurs de haut niveau dans des domaines variés, allant de la santé aux sciences humaines et sociales, en passant par les sciences et la technologie. Elle s’appuie sur les forces et la grande interdisciplinarité qui caractérisent Sorbonne Université, notamment à travers ses instituts. De par mon parcours de formation qui m’a mené des mathématiques vers une grande école de commerce en passant par un bachelor de droit européen, je crois énormément en l'innovation par l’interdisciplinarité. Prenons l’exemple de l’IA. Nous ne pouvons plus aujourd’hui développer des algorithmes sans nous préoccuper des impacts qu’ils auront sur la société, le travail, le droit, etc. Dotée d’équipes de recherche et d’enseignement capables de se saisir d’enjeux à la croisée de la technologie et des sciences humaines et sociales, Sorbonne Université offre, selon moi, un terrain fertile et différenciant pour l'innovation interdisciplinaire.

Quels seront vos chantiers prioritaires ?

P. W. : Il y a matière à renforcer davantage encore la Satt sur son cœur de métier en augmentant, par exemple, le nombre de déclarations d'invention, le nombre de coopérations avec des industriels, mais aussi avec tous les autres membres de l’Alliance Sorbonne Université et de son écosystème.

L’autre mission que je vais pouvoir mener avec l’appui de l’équipe expérimentée de la Satt, ainsi que son conseil d’administration, c’est de nourrir une proximité avec les chercheuses et les chercheurs. Pour cela, je souhaiterais pleinement m’intégrer, avec la Direction de la Recherche et de l’Innovation (DR&I) et les directions de recherche et de valorisation de Sorbonne Université, dans un collectif de valorisation resserré qui va sur le terrain à la rencontre des chercheurs, comprendre leurs enjeux, leurs défis et leurs aspirations.

Quelle sera votre vision stratégique pour la Satt Lutech ?

P. W. : Ma vision stratégique s'inscrit dans celle du Pôle universitaire d’innovation (PUI) afin que la Satt puisse jouer pleinement son rôle d’interface entre le monde socio-économique et la recherche. Elle s’appuiera, pour cela, sur les dispositifs mis en œuvre par l’Etat pour stimuler l'innovation, mais aussi sur la Cité de l'innovation, un projet ambitieux et visionnaire.

Comment envisagez-vous le rôle de la Satt Lutech au sein de ce nouvel écosystème qu’est la Cité de l’innovation de Sorbonne Université ?

P. W. : La Cité de l’innovation représente une opportunité exceptionnelle pour la Satt Lutech, à plusieurs niveaux. Sur le plan humain, elle sera un véritable carrefour où convergeront divers acteurs de l'innovation et de la valorisation, tels que des chercheurs, des entrepreneurs, des industriels, des investisseurs, des étudiants, l'incubateur Agoranov, la Maison des modélisations, ingénieries et technologies (SUMMIT), et d'autres entités. En réunissant cette communauté au sein d'un même lieu, la Cité favorisera les échanges, la création de nouvelles idées et de partenariats.

Sur le plan de la visibilité, elle sera un symbole fort de l'engagement de Sorbonne Université dans le domaine de l’innovation. Incarnée dans un geste architectural contemporain au cœur d'un quartier historique de Paris, elle symbolisera la rencontre entre Histoire et préparation de l’avenir, offrant un cadre propice à l'éclosion de projets novateurs. La présence de start-ups et de projets de recherche inspirants contribuera à stimuler l'émulation et à susciter de nouvelles initiatives.

Enfin, sur le plan de l'attractivité, la réussite de la Cité de l’innovation dépendra en partie de sa capacité à devenir un lieu de vie dynamique, doté d'une identité forte. La Satt Lutech peut jouer un rôle pour le collectif en contribuant à animer et à catalyser les interactions, en favorisant les synergies entre chercheurs, entrepreneurs et investisseurs, en encourageant la naissance de projets collaboratifs et en soutenant le développement de start-ups issues de la recherche académique.